La metaphore, un des procedes de l'evolution semantiques des mots

La métaphore. La métaphore ( du grec metaphora qui signifie proprement “transfert”) est la dénomination d`un objet par un autre lié au premier par une association de similitude.

Par métaphore on désigne un nouvel objet ou phénomène qui, contrairement à la métonymie, suppose quelque propriété ou trait commun avec l`objet ou le phénomène antérieurement désigné par le mot. C`est précisément ce trait commun qui permet d`établir un rapport de similitude entre des objets et des phénomènes différents. Pourtant ce lien de similitude qui est à la base de la métaphore est parfois subjectif, arbitraire, le rapprochement des objets inattendu. Ainsi, on apelle une tête de loup une brosse ronde portée sur un long manche et servant à nettoyer les plafonds, quoiqu`il n`y a pas de ressemblance évidente entre cette brosse et une tête de loup.

La figure de la métaphore sera: abcdec ou c est l`indice notionnel commun. La métaphore est un procédé sémantique extrêmement fécond. Tout comme la métonymie elle crée de nouveaux sens et emplois sémantiques. Les métaphores concrètes sont bien fréquentes. Ce sont souvent les noms d`objets qui servent à désigner d`autres objets de la réalité: le nez d`un navire; le bec d`une bouilloire, d`une théière; le col d`une bouteille; le pied d`une colline; un bras de mer; la crête d`une montagne; les dents d`un peigne, etc. Parmi ce genre de métaphores on peut nommer, en particulier, les substantifs désignant des instruments de travail: mouton – «баба для забивки свай», bras – «кронштейн».

Certains métaphores désignent l`homme par le nom d`un objet concret: C`est une scie cette femme! (une personne ennuyeuse); Quelle grande perche de fille! (longue comme une perche); C`est une véritable fontaine! (une personne qui pleure facilement); un drôle de zèbre! – “un individu bizarre”.

Souvent les métaphores désignent l`homme par le nom d`un animal quelconque ; ce sont parfois des appellations injurieuses: un animal (скотина) et aussi un gorille – “garde du corps, agent secret”, un cochon, un âne, une oie, une pie, une vache.

La métaphore est un moyen très usité de la création de sens et d`emplois abstraits partant de sens concrets. On dit: une lourde besogne, une profonde douleur, un reproche amer, le feu des passions, la dureté de l`âme, le printemps de la vie, être bouillant de colère, un avenir lumineux, une situation douillette, un carrousel ministériel, l`opinion publique a basculé, renouer un dialogue, briller par son esprit, etc. Les métaphores de ce genre sont très nombreuses, on en crée à tout moment, souvent dans les buts expressifs. Citons-en quelques-unes parmi les plus récentes: basculer – “changer d`une facon soudaine et irréversible” (cf.: le temps avait basculé ; bloquer – “empêcher de réussir, de fonctionner”; carrefour – “situation où on est obligé de choisir entre plusieurs décisions possibles”; bombe – “nouvelledont la divulgation cause une vive surprise, un scandale, etc.”; boomerang – “acte hostile ou argument qui se retourne contre son auteur et lui cause un dommage”.

À l`origine la métaphore comporte toujours une image . Toutefois grâce à son caractère conventionnel la métaphore perd facilement son caractère imagé, et parfois seules des dépouilles étymologiques font revivre l`image initiale. Tel est le cas de branche qui dans le latin populaire recelait l`image de “patte d`animal”. On peut dire la même chose de rue, poudre, penser qui à l`origine signifiaient respectivement “ride”, “poussière”, “peser”.

Tout comme les métonymies les métaphores de la langue sont des dénominations directes d`objets ou de phénomènes ou bien des acceptions figurées et émotives (cf.: bouton-d`or, bras d`un fauteuil, un petit monstre, quel charcutier!, un gobeur de fausses nouvelles).

À côté de la métaphore vient se placer un procédé d`évolution sémantique basé sur la similitude de la fonction de deux objets. Ce phénomène repose non pas sur la ressemblance des objets comme tels, mais sur la similitude de la fonction qu`ils remplissent et qui permet de les rapprocher. Ainsi les mots plume et fusil désignaient autrefois : le premier, « une plume d'oie pour écrire », le second, « le foyer >v(du lat. pop. facile, de fociis - « foyer ») ; par la suite ces mots ont désigné des objets nouveaux associés aux premiers grâce à la communauté de leurs fonctions.

Non seulement ce moyen sémantique rappelle la métaphore, mais il se confond souvent avec elle. En effet, des cas se présentent où l'on transfère le nom d'un objet à un autre comparé au premier quant à la communauté de la fonction et la ressemblance extérieure. Le peigne n'est pas uniquement un instrument taillé en forme de dents et servant à démêler ou retenir les cheveux, mais également un outil spécial de forme et de fonction semblable dont on se sert pour apprêter la laine, le chanvre, etc.

Quelles sont les sources des métaphores ? Les métaphores ont à leur base des comparaisons puisées dans tous les domaines de l'activité de l'homme. Chaque profession, chaque métier, chaque occupation estime source intarissable de comparaisons, donc de métaphores. Ainsi le sport a donné naissance à se cabrer, aller à toute bride, tenir le dé (de la conversation), l'échapper belle (« manquer une balle » dans le jeu de paume). faire échec à : la chasse a donné : être à l'affût de, ameuter, appât, dépister, faire une battue, revenir bredouille : la vie'militaire a engendré : battre en retraite, faire assaut d'esprit, de politesse ; de la marine nous avons : s 'embarquer dans une affaire, chavirer.

Les métaphores sont surtout nombreuses dans l'argot. Pour s'en convaincre on n'a qu'à passer en revue les mots d'argot désignant certaines parties du corps humain. Pour tête on dit boule, cafetière, citron, œuf, pomme, cerise ; pour visage on a hure, façade, bobine ; une tête chauve devient un caillou ; les jambes deviennent des quilles, des tuyaux : le ventre est un buffet ou un coffre. Cette abondance s'explique par le re-nouvellement constant de l'argot1.