Guerre d'embuscades Front Polisario-Maroc et guerre diplomatique
Le dégagement mauritanien laisse face à face l'armée marocaine et les maquisards sahraouis, qui multiplient leurs attaques. En novembre 1979, l'Assemblée générale de l'ONU condamne l'occupation du Sahara occidental par le Maroc. Toutefois, sur le terrain, le Polisario est à la recherche de son second souffle, face à la contre-offensive déclenchée par les Forces armées royales, en mai 1980, et l'édification, à partir de 1980, d'un « mur de sable » destiné à protéger le Sahara utile (phosphates de Bou Craa, villes de Smara et El-Aiun), à interdire au Polisario l'accès à l'Atlantique et à verrouiller les frontières mauritanienne et algérienne. Le Polisario tente de reprendre l'intiative sur les terrains militaire (bataille de Guelta Zemmour, 1981 ; opération Grand Maghreb, 1984) et diplomatique.
L'admission de la RASD comme membre de l'OUA (février 1982) devient officielle au sommet d'Addis-Abeba en novembre 1984, provoquant le retrait du Maroc de l'organisation panafricaine. En 1985 et 1986, sous l'égide des Nations unies, les pourparlers indirects engagés entre le Maroc et le Polisario n'aboutissent pas. Mais, en 1988, le rétablissement des relations diplomatiques entre le Maroc et l'Algérie favorise l'accord des différentes parties concernées par le conflit sur un plan de paix proposé par l'ONU. L'Algérie retire son appui militaire et financier au Front Polisario.
Le plan de paix onusien : un référendum d'autodétermination
Après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu (6 septembre 1991), la Mission des Nations unies pour l'Organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) se déploie pour veiller à son respect. Pour relancer un processsus de paix enlisé, le secrétaire État américain James Baker est nommé en 1997 envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU au Sahara occidental. À trois reprises, en 2001, 2002 et 2003, il propose des plans de sortie de crise ; tous sont rejetés.
Les tractations reprennent en 2007, quand le Maroc présente aux Nations unies un plan de large autonomie, soutenu par les États-Unis et la France. Cependant, le Front Polisario et l'Algérie refusent toute solution qui ne comporte pas l'option de l'indépendance du territoire contesté.
En 2013, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, évoquant une crainte partagée par plusieurs États d'éventuelles retombées du conflit malien sur l'ensemble du territoire sahraoui, prolonge d'un an le mandat de la MINURSO et en trouve pour la première fois l'élargissement de son mandat aux droits de l'homme ; cependant l'initiative des États-Unis, qui présentent un projet de résolution proposant la création d'une mécanisme de surveillance des droits de l'homme intégré à la MINURSO, est catégoriquement rejetée par le royaume chérifien.[1]
De nos jours
Le 29 avril 2016, le Conseil de sécurité de l'ONU adopte une résolution prorogeant jusqu'au mois d'avril 2017 le mandat de la Mission des Nations Unies pour le maintien de la paix au Sahara occidental, conformément au vœu formulé par son secrétaire général Ban Ki-moon, qui a activement plaidé en faveur de sa reconduction.
La résolution 2285 réhabilite donc la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO). Après la querelle diplomatique l'opposant au secrétaire général de l'ONU, Rabat décide d'expulser 83 membres du personnel civil de cette mission suite aux propos de Ban Ki-moon sur l'« occupation du Sahara ».
41 ans après le début du conflit déclenché par l'octroi au Maroc (et pour un temps à la Mauritanie) du Sahara occidental sans consultation des Sahraouis qui subissent les modalités d'une décolonisation espagnole imposée, les positions apparaissent irréconciliables. Cependant, l'approche sous l'angle exclusif des relations internationales ou des rivalités politiques entre l'Algérie et le Maroc brouille encore trop souvent la perception de la nature d'un conflit dont l'enjeu central demeure celui du droit à l'autodétermination d'un peuple. La tentative de délégitimation des revendications sahraouies, présentées comme du séparatisme par la monarchie marocaine, n'est certainement pas étrangère à l'opération idéologique de construction d'un récit mythique autour des droits historiques « naturels » du Maroc sur le Sahara occidental.
Ce récit s'enracine dans la fiction d'un « grand Maroc » (qui comprendrait le Sahara espagnol, la Mauritanie, le nord du Mali, la région de Tindouf et l'Ouest algérien) et donne une tonalité expansionniste à la politique régionale du royaume. Ainsi, l'examen des véritable enjeux d'un conflit qui empoisonne les relations intermaghrébines et hypothèque l'avenir de la coopération régionale dans un contexte sécuritaire instable ne peut faire l'économie d'une analyse des lacunes et des contradictions que renferme le discours d'une souveraineté « historique incontestable » de Rabat sur le Sahara occidental. Elle impose également une réflexion plus profonde sur la responsabilité de la communauté internationale à travers l'ambivalence d'une position qui, sans reconnaître la souveraineté du Maroc, tend à nier la nature « coloniale » du conflit, en prenant part aux logiques perverses d'humanitarisation du problème des réfugiés sahraouis, ou d'aide au Maroc en matière de coopération économique pour le développement de la région. Les pesanteurs historiques et les intérêts économiques des grandes puissances expliquent l'abandon progressif de l'option référendaire qui, pourtant, réglerait définitivement le sort de la dernière colonie d'Afrique.
Ce dossier tente de revenir sur les raisons de la persistance du blocage de tout processus de règlement à travers l'analyse de la position du droit international, et la fausse dichotomie intégrité territoriale /droit à l'autodétermination. Il resitue l'importance des enjeux internes de cette question pour la stabilité politique de la monarchie, ainsi que l'impact des enjeux économiques qui aiguisent les appétits de puissance.[2]