FIN DE L’ACTE 2

ACTE 3

(Le Prince Uoht est a genoux au milieu de la scene. Le Prince Aldone est a ses cotes, debout. Le Prince Thale, sur l’un des cotes de la scene, un genou a terre, medite.)

LE PRINCE UOHT

(faisant face au public)

Pardon O Hassatur!

O toi qui a jamais rayonne sur Carcosa

O toi qui pour toujours embrasse notre foi!

Sauras-tu pardonner a ceux qui t’ont bafoue?

Pourras-tu oublier l’insulte et la lachete?

LE PRINCE ALDONE

Par la voix de son pretre Cassiilda t’a trompe;

Elle a brise ses voeux, choisi l’autre lignee:

Nyarlathotep lui-meme a signe son forfait.

LE PRINCE UOHT

Nous l’avons enfermee,

elle paiera tu le sais.

Ici en Carcosa

chaque habitant attend

Que la belle Cassiilda

Perisse sous ses dents.

LE PRINCE ALDONE

Le pretre sera chatie;

Aura la langue tranchee.

Et pour avoir parle,

Se taira a jamais.

LE PRINCE UOHT

Vois notre desespoir et celui de tes fils!

Pourquoi ne pas saluer ce double sacrifice?

Cassiilda... Naotalba...

Ils ne suffisent donc pas?

LE PRINCE ALDONE

Tu nous laisses mourir!

Regarde ces chiens courir!

Deja depuis Kadath

On peut voir leurs frigates

Qui volent sur les eaux

Tel un vol de Mi-Go.

Si nos homes sont cent,

Eux se comptent par mille,

Deversant notre sang

Et decimant nos villes.

Ne feras-tu donc rien pour eviter les cris?

Souleve tes armees, envoie tous tes byakhees!

LE PRINCE UOHT

Prends cette femme sacrilege, epargne tes enfants!

Elle a trahi son dieu, crois-en nous: sois clement!

LE PRINCE THALE

(se levant et faisant un signe pour apaiser ses freres)

Freres.

Auriez-vous oublie ce que Pere nous appris?

Retrouvez en souvenir ce qu’a Leng il nous dit:

«O toi dont le coeur brule pour ceux qui sont brules

Dans l’Enfer ou un jour tu seras consume

Qui es-tu pour crier «Seigneur, aie pitie d’eux!»

Et pretender donner des lecons a ton Dieu?»

L’humain est a nos portes,

Que notre foi soit forte.

Si nous devons perir,

Perissons sans faiblir.

LE PRINCE UOHT

(se levant et s’adressant a Thale)

La raison est en toi,

Ayons coeur au combat!

LE PRINCE ALDONE

(tout en parlant, il sort de la scene pour aller chercher Cassiilda et Naotalba en coulisses)

Gardons force et courage,

Lavons seuls cet outrage.

LE PRINCE UOHT

Thale regarde et vois,

nous pouvons faire vengeance

et notre proper loi.

Ils ont seme la fange,

Tuons ces scelerats.

(Le Prince Aldone revient en tirant par le bras Cassiilda et Naotalba. Il les jette au centre de la scene. Court silence)

NAOTALBA, PRETRE DU SIGNE JAUNE

(avec peur)

Princes,

Vous vous fourvoyez!

Regardez donc les faits!

Cet acte fut sortilege,

nous tombames dans le piege.

Jamais au grand jamais

Je n’aurai succombe

Sic et infame vipere

N’avais trompe son pere,

Abandonne ses freres

et cru en cette chimere!

CASSIILDA

(hautaine)

Naotalba,

Tu t’emporte!

Il a ferme la Porte.

Oui j’ai change de route,

J’ai succombe au doute,

Et de Nyarlathotep

adopte les preceptes.

Mais crois-tu vraiment Pretre

qu’il n’y ait qu’un seul traitre?

NAOTALBA, PRETRE DU SIGNE JAUNE

(avec rage)

Damnee! ton ame est vile

Comme un choeur de sibylles!

LE PRINCE THALE

Cassiilda oublies-tu quel fut ton affront?

Nous ne suivons qu’un dieu, tu en as aime deux!

CASSIILDA

(avec rage et dedain)

Mais ne voyez vous pas

que la rage vous aveugle?

«Sous chaque shoggoth qui beugle,

se cache l’homme qui se noie!»

Vous tous etes coupables:

Qu’Hassatur vous accable!

aux griffes du Messager vous m’avez tous laissee!

Que me reprochez-vous si ce n’est son courroux?

LE PRINCE THALE

Notre ville est en flames,

n’est-ce pas assez Madame?

LE PRINCE ALDONE

Oui c’est bien par ton bras

Que mourrera Carcosa.

LE PRINCE UOHT

Et le mien par cette lame

t’enverra dans ses flammes!

(Le Prince Uoht fait mine de plonger un couteau dans le coeur de Cassiilda qui s’effondre a terre en hurlant.)

LE PRINCE THALE

(se precipitant au sol pour prendre Cassiilda dans ses bras)

Uoht! Mon proper frere!

Elle n’etait que priers!

LE PRINCE ALDONE

(fixant d’un regard terrible le Prince Uoht et s’avancant doucement vers lui)

Tu as plonge cette arme

dans son coeur et sans larmes.

Ma fille git a mes pieds!

Ma vie assassinee!

Par la puissance de Toth

Tu racheteras ta faute!

(Le Prince Aldone fait alors mine d’etrangler le Prince Uoht qui s’ecroule a son tour, mort. Le Prince Aldone tombe alors a genoux: prenant sa tete entre ses mains, il se met a pleurer en silence.)

NAOTALBA, PRETRE DU SIGNE JAUNE

(s’adressant au public et designant Cassiilda)

O non! O Hassatur pourquoi l’avoir laissee,

Par les mains de son pere ainsi executer?

Pour me faire pardonner

Il me fallait la tuer,

Car sans cela je suis

a tout jamais banni!

Mon etre ne vaut guere plus qu’un shantak desormais.

Ma vie je t’ai donnee, mon ame viens devorer!

(Naotalba ecarte alors les bras et hurle comme si son cerveau se faisait broyer par les machoires d’un dieu invisible.)

LE PRINCE ALDONE

(a genoux fixant la scene devant lui.)

Mon Frere.

Pourquoi pareil carnage?

Pourquoi autant de haine, de sang et de ravage?

J’ai cru chatier des chiens,

Et j’ai tue les miens.

Je ne suis plus que doute.

Ma voix meme me degoute.

Je t’en prie O mon frere,

Ecoute ma priere.

Fais que tes mains soient fortes,

Qu’au trepas elles me portent.

(Pendant ce temps, Le Prince Thale vient se placer silencieusement dans le dos du Prince Aldone et, lorsque son frere prononce son dernier mot, fait mine de lui trancher la gorge. Puis il enjambe les cadavres et se placant au devant de la scene., il s’adresse a un roi invisible.)

LE PRINCE THALE

O toi qui hante ces lieux,

Avatar de mon dieu.

En ce jour tu punis

Tout ceux qui t’ont trahi!

Ma promise, mes freres,

Et le pretre de nos pairs.

Tu as voulu la mort,

Je sais quel est mon sort!

Je connais le ritual,

Je le sais bien cruel:

C’est le sang de ta chair,

O Hassatur mon pere,

qui rendra plus immense

Ta force et ta puissance!

Par ce tragique destin

Tu pardonneras les tiens.

Par ce lourd sacrifice,

Tu sauveras tous tes fils!

(Le Prince Thale ecarte alors les jambs et les bras, ferme les yeux et la tete haute declame d’une voix forte et sereine.)

Hassatur me voila!

Pere je suis a toi!

Voici mon ame, prends-la...

Mais sauve Carcosa!

RIDEAU